CATHERINE DE SAINT-AUGUSTIN |
III-4. On lui donne le soin d'une fille possédée
CHAPITRE IV Vers la fin de l'année 1600. il y avoit à une lieue de Quebec, chez Monsieur Giffard Seigneur de Beauport, un certain meûnier que l'on a soupçonné avec raison d'étre Sorcier et Magicien: Il fut pendu l'année suivante 1661. à Quebec, pour des blasphémes horribles qu'il avoit prononcez, & pour avoir profané avec mépris les Sacrements de l'Eglise, ayant par une conversion simulée abjuré le Huguenotisme à son arrivée dans le Canada. C'est à ce malheureux qu'on attribua l'obessession des démons, qui parut dans une jeune fille de 16 ans. nommée Barbe Hallay, Servante dudit sieur de Giffard, & qui dégenera en possession formée dans le mois de Decembre 1660. Le lieu de la demeure de cette fille en étoit tellement infesté, que l'on voyoit les pierres voler de tous côtez, jettées par des mains invisibles, sans blesser qui que ce soit, quoy qu'elles passassent au travers d'une vingtaine de personnes, avec un bruit & une force aussi grande que si elles eussent été poussées d'un puissant bras. On y voyoit journellement des bouleversements & des tintamarres épouvantables, sans qu'il en parût aucune cause sensible. La seule fille possedée voyoit les démons qui luy apparoissoient sous diverses formes d'hommes, de femmes, d'enfans de bêtes, & de spectres d'enfer; & qui enfin parlenrent par sa bouche, & qui souvent aussi se faisoient entendre d'une voix intelligible, sans qu'il parût qu'ils se servissent des organes de la possedée. L'on jugea à propos de faire changer de demeure à cette pauvre fille, tantôt en une maison, tantôt en une autre; les démons la suivoient par tout: Enfin on la mit dans une chambre qui joignoit un parloir du Couvent des Religieuses Hospitalieres de Quebec; & l'on crut que personne ne seroit plus capable de rendre toutes les charitez necessaires à cette pauvre malade, que la Mere Catherine de saint Augustin qui étoit toûjours en disposition de soulager les affligez. en effet elle en eut un soin qu'elle prit durant un fort longtemps, & et de jour & de nuit. Les démons enrageoient contr'elle des mépris qu'elle faisoit d'eux, & de ce qu'elle leur arrachoit leur proye, étant plus forte pour conserver l'innocence de cette fille possedée, que n'étoit tout l'enfer pour la porter au peché. Ces malheureux démons ne pouvans pas l'intimider par toutes leurs menaces, tâcherent de la surprendre par leurs ruses, se transformans en Anges de lumiere, pour la jetter dans l'illusion. |