CATHERINE DE SAINT-AUGUSTIN |
IV-9. Voeu de gloire
CHAPITRE IX Dans les Exercices qu'elle avoit faits, le Pere de Brebeuf luy ordonna de faire le pact qui suit avec JESUS-CHRIST : Mon Dieu & mon aimable Redempteur JESUS-CHRIST! dans le desir que vôtre bonté infinie me donne d0étre fidele aux desseins qu'a eu de toute éternité vôtre saint Amour sur moy; je prens la hardiesse, quoy que tres-indigne, de faire un pact & accord je desavouë & renonce absolument, & pour toûjours à tout ce que les démons opereront en moy, contraire à vôtre divine Majesté: Que si ma bouche étoit si malheureuse que de s'ouvrir pour proferer des blasphémes & des impietez contre vous, mon Dieu! ou contre vôtre honneur, je proteste en vôtre divine presence, & en la face du Ciel & de la terre; que dés à present je m'en dédis, j'y renonce, & je pretens que lors méme que les démons se serviront de ma langue pour une si mauvais usage, mon coeur vous donne incomparablement plus de loüanges & de benedictions, & ait plus de respects mille fois pour vôtre divine Majesté, que ces malheureux esprits m'imprimeront pour lors en moy méme des sentimens contraires: Que si par un ordre de vôtre divine Justice, vous leur permettez d'exercer sur mon corps toute leur rage; je proteste que je ne veux jamais y donner aucun consentement ny aggrément. Plûtôt je vous demande mille morts; & je vous conjure, mon Sauveur, par vôtre infinie misericorde, que la confustion leur en demeure éternellement. Je reconnois dés à present, comme j'espere le faire dans toute l'éternité, que toutes les resistances que j'apporteray à ne pas obeïr aux démons, & aux tentations qu'ils me feront ressentir, sont & seront les effets de vôtre pure misericorde & bonté qui me soûtienndront, sans laquelle je succomberois à chaque moment. Je reconnois aussi que le plus grand honneur que vous me sçauriez faire, est d'aggréer mes petits & indignes services & souffrances, & en disposer comme bon vous semblera, sans jamais m'en rendre aucun salaire; tout vous étant dû par infinis titres. Disposez de moy dans le temps & l'éternité, selon vôtre bon plaisir. Que je vous aime seulement, ô mon Dieu! & je suis trop contente. Que jamais je ne fasse rien indigne de cét amour que je vous dois, & je suis trop riche.
Je supplie tres-humblement vôtre sainte Mere, ma tres-honorée Dame & Maîtresse;
son digne & chaste Epoux, les saints Anges, & tous les Saints qui sont au Cieul, sur-tout ceux qui daingnent m'honorer de leur protection speciale;
je les prie tous, de vous presenter ces desirs de mon coeur, & de vous faire agréer ce pact que je prens la hardiesse de faire avec vous,
dans tout le respect, l'amour, & la confiance dont mon ame est capable;
vous suppliant encore un coup, ô mon JESUS! de recevoir ces desirs, & d'aggréer que touts les mouvemens de mon coeur,
& les agitations de mes arteres & de mes veines, les respirations que je feray soient autant de momens & de mouvemens
qui vous témoignent le desir que j'ay d'étre inséparablement soûmise à voss ordres, dans le temps & l'éternité.
Quelque chose que les démons, ou mon amour propore me puissent inspirer de contraire à cette volonté, jes les desavouë & j'y renonce absolument & irrévocablement;
voulant que vous seul, ô mon Dieu & mon Tout! soyez maître absolu & unique de mon coeur, de mes desirs & de moy-méme;
ne voulant vivre & mourir qu'en vous & pour vous.
Catherine étoit son nom de Baptéme;
elle prit le nom de S. Augustin le jour de sa porfession à Bayeux;
elle prit le nom de Marie: par dévotion à saint Joseph, elle reçut son nom, lors qu'elle fut confirmée l'an 1659.
Le jour de la Purification de Nôtre-Dame, je sentis un grand desir que mon coeur fût purifié de totu ce qui déploisoit à Dieu. Je sentis pour lors la presence de Nôtre-Dame, & je m'entretins avec elle dans une grande confiance. Apres plusieurs colloques, je la priay de me vouloir presenter à son Fils; car je luy disois que venant de sa main, il ne me refuseroit pas. Elle m'accorda ce que je luy demandois, & me poussa à m'offrir d'une façon particuliere à sa divine Majesté. Elle me fit faire un voeu sans que j'y fisse aucune reflexion, si je le pouvois & si je le devois faire. Ce voeu est de faire tout ce qeu je connoîtray étre de plus parfait & à la plus grande gloire de Dieu; sans qu'aune consideration m'en puisse empécher. Je n'y fis pour lors aucune reflexion, n'étant pas à moy en ce moment là; car cela se passa fort promptement. Or apres je me voulus dédre de ma promesse, mais je ne le pus. Je priay seulement la sainte Vierge qu'elle trouvât bon que cette promesse ne me donnât point d'autre obligation, que celle que jugeroit mon Confesseur, ne m'étant pas libre de rien faire, sans sa permission & son conseil. Ensuite son Confesseur ratifia ce qu'elle avoit promis. |