Bienheureuse Marie-Catherine de Saint-Augustin
Née Catherine Simon de Longpré

CATHERINE DE SAINT-AUGUSTIN

I-5. Donation à la sainte Vierge

CHAPITRE V.
Elle se donne à la Sainte Vierge

Le 25. de Mars de l'année 1648. elle fit une nouvelle & totale donation
de soy-méme à la tres-sainte Vierge, de la façon qui suit.

Tres-sainte & immaculée Mere de Dieu! je Soeur Marie Cahterine de saint Augustin, quoy que tres-indigne de vôtre aimable presence, vous choisis de tout mon coeur, pour mon heritiere universelle de tout ce que j'ay fait de bien, dit, pensé, enduré, soit interieurement, soit exterieurement, spirituellement ou corporellement, tant pour le passé, que pour le present, ou l'avenir; ce que je ratifie par cét Ecrit, comme par donation irrevocable, sans qu'il puisse étre cassé ou diminué par aucun autre. je vous consituë encore, ô ma sainte Reine & Maîtresse! heritiere de mon corps, de mon coeur, de mon ame, de ma vie & de ma mort, à laquelle je vous supplie tres-humblement, ma chere Mere et Dame, vouloir assister pour avoir soin de ce qui vous appartient en qualité d'heritiere. je vous supplie encore dans toute l'étendue de mon ame, de presenter à vôtre cher Fils, ce pauvre & indigne heritage, afin qu'il daigne pour l'amour de vous, aggréer cette action; & comme vôtre heritage, de l'accepter & le mettre dans le domaine de son inifinie bonté & misericorde. Je m'asseure, ma tres-sainte Maîtresse! que si vous me voulez tant favorier, quoy qu'il soit moindre en valeur & merite, que le dernier de la pauvre veuve de l'Evangile, il l'acceptera pour un precieux Thresor venant de vôtre part. J'attens cela de vôtre faveur: ne rebutez pas, s'il vous plaît, cette pauvre ame pecheresse, la plus miserable, & la plus ingrate de celles qui par leurs offences ont irrité vôtre tres-aimé Fils & vous. O les neufs Choeurs des Anges, que je prends à témoins de cette action, commeje fais pareillement vôtre glorieux Epoux saint Joseph, les bienheureux Apôtres, mon saint Pere saint Augustin, & tous les Saints & Saintes du Paradis, particulierement vous autres Saints & Saintes qui avez été les favoris de la Reine que je consiituë aujourd'huy mon heritiere; je vous supplie en toute humilité de m'assister au grand jour du Jugement, & par avance au jugement particulier qui se fera de moy à l'heure de ma mort, en la presence de Dieu & de sa tres-sainte Mere; en cas que mes ennemis eussent quelques pretentions sur mes actions, mes paroles ou mes pensées, comme ayans été offertes, consacrées & données irrevocablement à la Mere de mon Sauveur! Et cependant ô bien-heureux Citoyens du Ciel, impetrez à mon ame, qui a dissipé tant de biens & de graces que Dieu luy a faites, la parfaite contrition de ses offences, & la grace de pouvoir étre telle, que sa Divine bonté le desire. Obtenez-moy encore toutes les vertus qui sont requises pour ma perfection, & pour l'augmentation de l'heritage de la sainte Vierge; luy protestant (de quoy je vous prends à témoins) que si je pouvois augmenter cét heritage qui est à elle, d'autant de bonnes oeuvres, d'actes d'amour, de foy, de reconnoissance, & de toutes sortes de vertus, comme il y a d'étoiles au Ciël, de grains de sable dans la Mer, d'atomes aux rayons du Soleil, de creatures animées & inanimées qui sont & seront jusques à la consommation du monde, & qui pourroient étre produites en toute l'éternité; je le ferois de tres-bon coeur, & j'estimerois avoir tres-heureusement travaillé pour une Reine si parfaite & si auguste. Telle est ma volonté, & en foy de ce que dessus; je signe, Soeur Cahterine de saint Augustin. FAIT & passé l'an de nôtre salut 1648. le 25. Mars, jour de la bienheureuse Annonciation de la tres-pure & Immaculée Mere de mon Dieu, ma Reine, ma Dame, ma Mere & Maîtresse, mon unique esperance & mon tout, apres son aimable Fils: de mon âge le 15. an passé.